ARTICLE DE PRESSE
( paru dans le journal info : 20 Août 2002 )

                MON CURE CHEZ LES CULTURISTES ( COUVERTURE - PARTIE 1 - PARTIE 2 )
                                 par Jean-Paul Boithias

        La foi soulève bien des montagnes. Saint Thomas n'en serait pas revenu. A 32 ans, Pascal Girard mène de front son ministère de prêtre et une carrière de sportif de haut niveau ! Rencontre avec l'homme fort de l'Eglise auvergnate.

    Ce curé était un gaillard carré, ramassé, ... Il quitte sa soutane en deux temps, ne garde que sa culotte ... Puis il revient au bûcheron , l'accroche, le ceinture, le pile, le pille, le pétrit, le roule, le met en boule en un tournemain, et le dépose dehors comme un ballot de linge sale. Après ça, les gens se seraient mis à genoux devant lui. Et au bout de quatre ou cinq ans on le regardait comme un saint, tant il est vrai qu'un homme qu'on admire a toutes les vertus ...

      Contrairement au curé de Notre Dame, de Mons, décrit ici en plein pugilat par Henri Pourrat dans son chef d'oeuvre : Gaspard des Montagnes, Pascal Girard n'utilise sa force qu'à des fins pacifiques, dans une discipline sportive relativement méconnue, la force athlétique.

      Poignée de main franche et petit mot de bienvenue, le jeune prêtre de Beaumont ( en partance pour le secteur de Riom ) se fend d'un large sourire en nous accueillant dans les locaux du presbytère. Voici deux ans qu'il exerce son ministère par monts et par vaux, de Beaumont à Saint Genès Champanelle, en passant par Vallières ou Ceyrat.

      Un emploi du temps chargé mais qui ne l'empêche pas cependant de consacrer quelques heures pas semaine à son sport favori : la force athlétique ou powerlifting. Cette discipline, introduite en France depuis une quinzaine d'années regroupe trois mouvements, le squat, le développé couché et le soulevé de terre. A mi-chemin entre la musculation et l'haltérophilie, elle constitue le sport numéro un chez les personnes handicapées.

      Dans le milieu, on me surnomme Schwarzy, lance notre curé en rigolant. Je pratique la discipline depuis de nombreuses années, essentiellement en développé couché. En réalité, je fais du sport depuis l'enfance. Pour moi, c'est une chose naturelle, indispensable à mon équilibre, et qui m'aide énormément dans mon métier de prêtre.

                    Un sportif de haut niveau

      Avec 1,83 m pour 105 kilos, et du muscle à revendre, Pascal Girard ne fait pas vraiment dans la demi-portion et un ersatz de Pépone y réfléchirait certainement à deux fois avant de lui chercher querelle ! A l'image des sportifs de haut niveau, notre prêtre s'astreint à une hygiène de vie rigoureuse et surveille étroitement son alimentation. En règle générale, je m'entraîne deux fois par semaine. Deus séances où je pratique des développés couchés avec différents poids et des exercices de musculation spécifiques. Pour l'alimentation, je prends des compléments sous forme de barres vitaminées.

      Les entraînements se déroulent au Sun Club de Gerzat, où une vingtaine d'initiés partagent les joies et les douleurs du pousseur de fonte. Avec 212 kilos soulevés en compétition et un record personnel perché à 230 , l'abbé Girard fait parti de l'élite nationale dans la catégorie des moins de 110 kilos. Le record de France est fixé à 245 kilos, une charge éventuellement accessible avec beaucoup de pratique, précise l'intéressé.

      Pour soulever de tels poids, pas question d'invoquer Dieu ou les saints de la Terre. Si ses amis le chambre parfois en assurant qu'ils sont deux à forcer, lui assure que curé ou pas, c'est bien le même homme qui pousse, démontrant par là que l'aide de son illustre patron demeure somme toute très relative.

      Aujourd'hui, de plus en plus de prêtres font du sport, soutient le jeune ecclésiastique. Cela nous permet de sortir de la paroisse, de rencontrer des gens venus d'horizons différents et qui ne sont pas tous croyants.

      Quand on lui parle de dopage, Pascal Girard monte rapidement au créneau. Franchement, il y a très peu de cas dans notre discipline, indique -il. Dans le milieu, les tricheurs sont vite repérés. On ne peut pas soulever des barres importantes en quelques mois, il faut une expérience de plusieurs années. Une personne dopée ne dure pas car elle sera inévitablement victime de blessures.

      Côté blessure justement, les accidents demeurent extrêmement rares. les athlètes disposent d'un équipement spécifique comme des ceintures et des bandes de poignet. Un attirail qui permet de forcer à l'envi, en toute sérénité.

                    Objectif 300 kilos

      Dans le petit monde de la force athlétique, l'homme impose le respect. Plus d'un compétiteur a déjà reçu, de manière amicale, une absolution sportive de première classe. Titulaire de deux titres de champion de France obtenus en 1992 en junior, et en 1995 dans la catégorie senior, Pascal Girard ne compte pas s'arrêter en si bon chemin. L'année prochaine, mon but est de soulever une barre de 227 kilos, afin d'intégrer l'équipe de France en vue d'une éventuelle participation aux championnats d'Europe. 

      A plus long terme, notre curé envisage de changer de catégories pour batailler ferme chez les moins de 125 kilos, avec pour but ultime, la barre des 300 patates. Un poids mythique avoue t-il. Mais pour cela, il faudra avant tout prendre du poids, et si possible, du muscle plutôt que de la masse graisseuse.

      Quoi qu'il en soit, Pascal Girard espère bien pouvoir pratiquer son sport jusqu'à 70 ans, se remémorant en cela la parole soufflée un jour par monseigneur Jean Dardel, l'ancien évêque de Clermont : surtout, continue de faire du sport, tant que tu peux. Un conseil pris quasiment comme une parole d'Evangile !
  
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